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« On a gagné ». A 20 h , le cri de joie s’est élevé dans la douceur du soleil couchant. 10 ans après le 21 avril, la malédiction qui frappait la gauche a été effacée. La victoire tant espérée est donc là, comme un parfum de 10 mai 81, mais avec moins, beaucoup moins d’illusions qu’il y a 31 ans…

 

 

Aujourd’hui comme hier, nous sommes heureux d’avoir pu fêter à la Bastille la victoire de toute la gauche au milieu de centaines de milliers de jeunes enthousiastes. Heureux de nous être débarrassés de ce Président des riches qui a tant divisé les français. Fiers de cette campagne, de ce premier mai, de ce débat télévisé au cours duquel le nouveau Président a gagné ses galons de chef d’Etat face à celui qui a préféré le cynisme aux valeurs pour tenter de conjurer une défaite annoncée. Soulagés de ne plus entendre un ministre de la Défense bâtir à coups de lapsus et de vraies fausses prises de position, la nouvelle alliance entre ce qui restera de l’UMP et le Front national… Oui, nous sommes contents d’avoir « dégagé » Sarkozy. Plus de Sarkozy et plus d’anti-sarkozysme, la voie est libre pour bâtir.

 

 

Mais ce n’est pas pour autant que nous donnons un chèque en blanc à François Hollande. D’ailleurs, il ne le demande pas ! Hier, à Tulle comme à la Bastille, il a appelé à continuer le rassemblement, à ne pas baisser les bras, à rester des citoyens mobilisés, vigilants face aux menaces qui nous entourent. Dans un tel contexte, nous ne pouvons que reconnaître son obstination, son intelligence, sa capacité de rassemblement de la gauche, des écologistes, des centristes humanistes, mais nous savons qu’il n’y aura pas d’état de grâce et que les difficultés commencent aujourd’hui. Pas de « grand soir », mais de la lucidité et la demande de changements concrets, de mesures qui rendent la vie un peu moins dure, un peu moins violente. Cette demande d’un réformisme tranquille est peut-être la chance du nouveau Président qui n’a pas beaucoup promis. S’il donne quelques signes, s’il tient l’essentiel de son programme, il apparaitra comme un nouveau Mendes–France et il fédèrera derrière lui les énergies.

 

 

Nous n’avons pas besoin d’un omni président, mais d’un arbitre, d’un garant de l’Etat de droit, d’un président qui rassemble, qui apaise, qui protège, d’un Président qui laisse au Parlement, à la société, aux «corps intermédiaires », le soin de recoudre le tissu social déchiré par les années de crise et par une droite qui a piétiné allègrement les valeurs de la République.

 

 

Cette campagne restera comme le révélateur de la crise politique et morale de la France. L’entre deux tours a été dur, à l’instar de la stratégie de la tension que Nicolas Sarkozy a tenté d’imposer. Il a tout essayé pour grappiller les voix du Front national, au point d’installer Le Pen et son rassemblement « Bleu marine » , en juge de paix de la recomposition politique. Résultat : le poison de l’extrême droite est là pour de nombreuses années, comme le prouvent les résultats de dimanche où l’écart s’est dangereusement resserré ; la coagulation entre les deux électorats de la droite dite républicaine et de l’extrême droite est en cours. Même si Sarkozy a tout perdu en misant sur cette alliance, il n’est pas impossible qu’en 2017 nous ayons à affronter un bloc néo-conservateur et national-populiste dont l’éventuelle arrivée au pouvoir fait frémir.

 

 

Comme écologiste, ma position est claire : nous devons mouiller la chemise, participer à la gestion gouvernementale, quel que soit le prix à payer à moyen terme. Il sera lourd, car la crise est grave. Le gouvernement de gauche devra prendre des mesures impopulaires, qui seront contestées dans la rue, y compris par ceux qui ont élu le nouveau Président, mais nous devrons les assumer. Elles seront comprises si elles sont justes et si tout le monde, notamment les plus aisés, prend sa part du fardeau. Elles seront admises si les valeurs de la République, notamment l’égalité, la fraternité, l’accès de tous à la dignité et à la justice, sont respectés.

 

 

Au gouvernement et au Parlement, les écologistes seront de ceux qui, sur la ligne de front, dans la société, feront entendre les aspirations de la population dans les palais de la République et les ministères. Au sein de la majorité présidentielle, ils rappelleront les engagements du Président, mais ils se battront aussi pour l’application du programme PS/ EELV, signé en novembre dernier par les deux partenaires.

 

 

Le projet présidentiel n’est pas le contrat de législature et François Hollande a raison de le souligner. Pour notre part, c’est au Parlement et dans la construction d’un rapport de forces dans la société que nous pourrons faire avancer les mesures contenues dans l’accord. Soyons clairs : ça ne sera pas une partie de plaisir.

 

 

La crise que nous connaissons, je l’ai dit et répété dans ces colonnes, est la plus dure que nous traversons depuis 1929. Elle se nourrit d’une crise écologique qui en décuplera les effets. Dans toute l’Europe, ce continent devenu l’homme malade du monde, le national-populisme va prospérer sur les effets de cette crise.

 

 

François Hollande arrive aux affaires au moment où un basculement du monde fait apparaître l’Europe comme perdant son leadership par rapport aux pays émergents. Le prochain G8 montrera que sa marge de manoeuvre est très mince. François Hollande devra avoir le soutien de toutes les forces vives de la France pour s’imposer face à Angela Merkel et à Barack Obama, face à la Chine et à la finance internationale.

 

 

Quelques jours après le G8, commencera le sommet de l’OTAN, où il annoncera aux dirigeants de cette Organisation qu’il retire nos troupes d’Afghanistan. Là aussi, il faudra que nous soyons à ces côtés pour que le Président se sente poussé par le changement.

 

 

Et quelques semaines après, Rio+20 débutera, ouvrant la voie à des avancées – ou à des reculs – sur la question écologique. Là encore, là surtout, les écologistes devront être toutes et tous sur le pont et dans les soutes, pour que le navire de la gauche et de la France ne sombre pas dans les petits matins gris de la gestion et du court terme.

 

 

Le 6 mai a été une belle fête. Le 7 mai, les difficultés commencent. Raison de plus pour prendre notre part, toute notre part, au changement qui commence. Le changement maintenant, oui, mais le changement vraiment !

 

 

Noël Mamère. Le 7 mai 2012.

 

Tag(s) : #Présidentielle 2012
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