Tarifs, régularité, horaires… Pierre Serne, vice-président (EELV) du conseil régional d’Ile-de-France chargé des transports et Bénédicte Tilloy, directrice générale du Transilien, répondent ensemble aux questions du Parisien concernant la circulation des trains en Ile-de-France.
Le passe Navigo à tarif unique n’a pas été mis en place cette année. Est-il encore possible que vous teniez cette promesse ?
Pierre Serne : Il s’agit de la promesse emblématique de la majorité (PS-Verts) sur cette mandature, nous n’allons donc certainement pas y renoncer. Au contraire, je vous assure que la tarification unique sera mise en place cette année.
Pourtant, son financement ne dépend pas de vous…
P.S. : C’est vrai que nous pensons dégager les 400 M€ nécessaires en relevant le taux du versement transport (assuré par les entreprises, il représente 40% du budget du Stif) mais cette décision relève d’un vote au Parlement. Tout dépend donc de nos relations avec le gouvernement et les législateurs. Je constate qu’en la matière, Jean-Paul Huchon tient un discours très volontaire.
N’est-il pas dommage de se priver d’un outil efficace, la tarification, pour juguler la saturation en heure de pointe ?
Bénédicte Tilloy : Tout d’abord, je rappelle que la fixation des tarifs est une décision qui ne m’appartient pas, elle est politique. Pour ma part, avant d’être à la direction de Transilien, j’ai été chargée du développement de la politique tarifaire des TGV (le prix des billets n’est pas le même en semaine et le week-end, le soir et le matin…, NDLR), l’objectif étant d’augmenter le taux de remplissage des trains. A l’inverse, la Metropolitan Transportation Authority de New York a décidé d’utiliser les tarifs pour désemplir ses trains en heure de pointe. Je constate qu’en Ile-de-France les collectivités préfèrent miser sur l’investissement, en achetant des trains neufs, plus capacitaires, mieux à même d’absorber cette pointe plutôt que de chercher à l’étaler…
P.S. : Oui, cela dit, on prend le TGV plutôt pour ses loisirs et les transports en commun de proximité plutôt pour aller travailler ou étudier. Et là, le prix n’est pas le levier le plus efficace pour juguler la pointe. Si on mettait des péages sur des portions d’autoroute aujourd’hui gratuites, il y aurait quand même des bouchons.
C’est pour ça qu’il y a quelques mois, vous avez lancé l’idée de travailler en horaires décalés ?
B.T. : Effectivement, et un certain nombre d’entreprises, comme celles dans la zone de Plaine Commune (Saint-Denis) où se trouve la SNCF, sont prêtes à tenter l’expérience.
P.S. : Tout comme Plaine Commune, la Défense a vocation à être une zone d’expérimentation. Si on fait changer les habitudes sur quelques grands pôles d’activités, on soulage les lignes qui y mènent mais aussi toutes les autres. Il faut inciter les Franciliens à éviter les heures de pointe. Pour cela, il faut leur proposer une offre qui tient la route en heures creuses, par exemple avec un minimum d’un train par demi-heure.
Les bilans de ponctualité établis par le Stif sont régulièrement décriés par la SNCF et la RATP. Les objectifs fixés ne sont-ils pas inatteignables ?
P.S. : Les objectifs, fixés en 2000 avec les opérateurs, ont probablement été définis avec trop d’optimisme. Quatorze ans et un million de voyageurs supplémentaires plus tard, ils sont d’autant plus difficiles à réaliser. Les opérateurs nous le disent, c’est démotivant pour leurs équipes de savoir qu’on leur fixe des objectifs inatteignables.
Pourquoi ne pas les réajuster ?
P.S. : Politiquement, ce n’est pas tenable. Vous imaginez le signal envoyé aux usagers?! Et puis, avec tous leurs défauts, ces objectifs de ponctualité sont un tableau de bord très utile et doivent rester un point fixe à atteindre.
B.T. : Par ailleurs, quand les conditions sont réunies, ces objectifs sont parfaitement atteignables. C’est par exemple le cas de ligne H, où toutes les gares et le matériel roulant ont été rénovés. Résultat : sur cette ligne, l’objectif de ponctualité a été pulvérisé!