Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

De-la-lacheteMichel Deléan sur www.mediapart.fr le 11 mars 2011

 

 

Pour les écologistes parisiens, le compte n'y est pas. Selon des informations obtenues par Mediapart, neuf élus et militants associatifs, tous contribuables parisiens, viennent de remettre en cause le protocole d'accord signé entre la municipalité d'une part, Jacques Chirac et l'UMP d'autre part. Cet accord devait mettre fin au contentieux lié au fameux dossier des chargés de mission de l'Hôtel de Ville, dans lequel Jacques Chirac aurait dû être jugé à partir du lundi 7 mars devant le tribunal correctionnel de Paris, avant qu'une« QPC » miraculeuse ne renvoie le procès à une date indéterminée. Au terme de ce protocole, approuvé par le conseil municipal le 27 septembre dernier, la ville de Paris recevait la somme de 2.212.072,46 euros, et retirait sa constitution de partie civile au procès pénal.

 

 

Verts de colère, les neuf contribuables ont chargé l'avocat Pierre-François Divier, déjà à l'origine de la plupart des plaintes déposées contre la gestion municipale des années RPR, d'engager une action avant l'ouverture du procès Chirac. Le 6 mars, Me Divier a donc adressé en recommandé à Bertrand Delanoë une "demande préalable au titre de l'article L.2132-5 du code général des collectivités territoriales". En clair, l'avocat demande au maire de Paris "d'agir en responsabilité" contre l'Etat "pour le voir condamné à payer à la commune de Paris une somme, sauf à parfaire, s'élevant à 5.186.201,06 euros".

 

 

La différence entre les deux chiffres, ce qui a été effectivement réglé et ce qui est aujourd'hui réclamé, est plus que conséquente. Les 2,2 millions du protocole entériné en septembre concernent les salaires des chargés de mission "fictifs" qui étaient salariés par la Ville, tels qu'ils apparaissent dans les deux dossiers instruits au tribunal de Paris et à celui de Nanterre, mais cela seulement après le 26 octobre 1992, en raison de la prescription pénale des faits. Ce total comprend également un calcul de taux d'intérêt, et les frais d'avocat supportés par la Ville. Les écologistes contestent catégoriquement cette addition.

 

 

Pour les Verts, il manque 5 millions

 

Méticuleux, le conseiller du XVIII° arrondissement Olivier Raynal a refait tous les calculs sur de grands tableaux. Selon lui, le système des chargés de mission a commencé dès l'élection de Jacques Chirac comme maire de Paris en 1977, et a coûté depuis lors quelque 7.288.607,23 euros à la Ville. Pour arriver à ce total, Olivier Raynal retient un régime de prescription des faits de trente ans au civil, et tient compte des cotisations salariales payées ainsi que des intérêts de retard. Pierre-François Divier et lui-même considèrent que Bertrand Delanoë connaissait de longue date le système des chargés de mission, et que l'action en justice aurait dû être engagée avant la loi du 17 juin 2008 réformant la prescription en matière civile.

 

 

Au terme de leur raisonnement, l'actuel maire de Paris serait donc responsable de ce qui s'apparente à une "faute se service" ou à une "faute personnelle", en omettant de demander les 5,2 millions d'euros selon eux manquants. "Il convient donc que vous en tiriez les conséquences, et que la Commune de Paris représentée par vous-même, en votre qualité de maire de celle-ci, recherche la réparation de ce préjudice en entreprenant l'action administrative appropriée contre l'Etat, lequel, le cas échéant, pourra engager une éventuelle et ultérieure action récursoire contre vous-même personnellement", écrit Me Divier.

 

 

Bertrand Delanoë a deux mois pour répondre favorablement à cette demande comminatoire, faute de quoi les contribuables écologistes menacent de saisir le tribunal administratif pour pouvoir se substituer à la Ville.

 

 

Dans le projet de délibération présenté au Conseil de Paris, Bertrand Delanoë expliquait : "Le protocole d'indemnisation qui vous est soumis n'a donc fait l'objet d'aucune négociation : son périmètre découle strictement de l'information judiciaire et plus particulièrement de l'ordonnance de renvoi de la juge d'instruction". Et le maire ajoutait : "C'est bien entendu l'intérêt de notre collectivité que de privilégier une telle solution sans être soumise aux aléas des audiences ni à l'évidente lenteur des procédures civiles qui les suivraient". Autre argument, en conclusion: "Le principe ainsi retenu (...) permet à la partie civile d'être indemnisée intégralement et sans délai".

 

 

Des écolos très soupçonneux.

 

Lors de la séance du conseil municipal, les 27 et 28 septembre 2010, les groupes PS et UMP avaient voté en faveur du fameux protocole d'accord. Pas les écologistes. "Ce sont les évaluations d'un juge d'instruction, mais la mairie n'aura aucun mal à démontrer que le préjudice est très sensiblement supérieur, si l'on prend en compte, ce qui n'a pas été fait, l'ensemble des charges salariales et la durée réelle des emplois fictifs", avait déclaré Yves Contassot. "Nous ne méconnaissons pas le principe de la prescription, mais nous aurions aimé qu'un protocole de transaction intègre cette réalité". Il ajoutait : "Contrairement à ce qui a pu être dit, il n'y a aucune haine, aucun esprit de vengeance, aucun acharnement dans notre démarche, simplement le refus d'une justice à deux vitesses".

 

 

Les neuf contribuables qui viennent d'engager l'action pour obtenir une indemnisation plus conséquente (parmi lesquels on trouve des militants de terrain comme Jérôme Gleizes ou Elisabeth Bourguinat) pointent également du doigt plusieurs accords politiques intervenus ces derniers temps entre la mairie de Paris et l'Etat-UMP. Décidémment soupçonneux, ils se demandent si l'accord Delanoë-Sarkozy-Chirac ne serait pas la face émergée d'un "deal" plus large...

Tag(s) : #Justice
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :