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Le tremblement de terre survenu à Haïti est une étape de plus dans le long chemin de croix que subit la « perle des Caraïbes ». Des dizaines de milliers de victimes, des millions de sans - abris, un pays dévasté. Comme si tous les malheurs du monde ne cessaient de s’accumuler sur cette terre depuis qu’un funeste jour de 1492, Christophe Colomb et ses conquistadores foulèrent le sol de ce qu’ils appelèrent aussitôt « Hispanola ».

 


C’est de là que tout est parti pour le capitalisme qui se construisit en accumulant les richesses du continent sud-américain et des caraïbes et en éliminant systématiquement les indiens, victimes du premier génocide de l’ère moderne. Par le glaive, la maladie, la mise en esclavage, les populations d’Haïti, de Cuba, des Antilles et la majeure partie des indiens de l’Amérique dite latine succombèrent. On les remplaça donc par une nouvelle « marchandise » issue du commerce triangulaire, les noirs arrachés à leurs royaumes d’Afrique. Au XIXe siècle, l’un de ces esclaves, Toussaint Louverture, croyant au message universaliste de la Révolution française, dirigea la première révolte d’esclaves et proclama Haïti indépendante. La revanche de la France fût sans pitié. Non seulement il fût assassiné mais Haïti dut rembourser des dizaines d’années durant une dette-punition de 150 millions de francs-or pour « rembourser » la France coloniale. Les Etats-Unis prirent alors la succession des Espagnols et des Français pour contrôler un territoire à portée de leur côte. De 1915 à 1934, ils occupèrent le pays directement puis, soutinrent les dictatures militaires en lien avec la France. Après avoir formé les Tontons macoutes, c’est elle qui a accueilli le dernier rejeton de la famille Duvalier. En ruines, sans Etat, l’île continua à s’enfoncer dans la misère, au point de devenir l’un des pays les plus pauvres du monde. 80 % de la population vit sous le seuil de pauvreté, avec 1,30 euros par jour.

 


Si ce tremblement de terre est une catastrophe naturelle, il est aussi le produit de cette histoire : l’urbanisme anarchique, les maisons construites n’importe comment sur n’importe quoi, les terrains dégradés par la monoculture, l’absence d’infrastructures publiques... Tout a contribué à l’aggravation de la catastrophe. Lorsque des tsunamis ou des ouragans touchent l’île voisine de Cuba, on est fortement impressionné par l’absence de conséquences mortelles. C’est qu’à Cuba, quoi que l’on puisse penser du régime politique - et nous en pensons bien du mal !-, la défense civile mobilise les énergies de la population pour sauvegarder la vie humaine.



A Haïti, c’est le contraire. La loi de la jungle, héritage des dizaines d’années de pillage des ressources par les plus riches, a produit une culture mortifère entremêlée de fatalisme, de résignation et de dépendance. Ce peuple fier qui a donné naissance à la première République des Caraïbes et d’Amérique Latine, est aujourd’hui le spectateur impuissant de ses malheurs. C’est pourquoi les larmes de crocodile poussées par la communauté internationale sont indécentes. Les ONG se livrent à une concurrence que l’on avait déjà constatée lors du tsunami qui a balayé l’Asie. Les médias s’intéressent à ce qui se passe sous les décombres de l’Hôtel Montana, aux nombres de morts de leurs nations respectives, aux exploits des sauveteurs et aux bisbilles entre La France et les Etats-Unis qui contrôlent l’aéroport de Port au Prince, sans mandat. En envoyant de nombreux hommes de troupe, ils se sont substitués à la défaillance de l’Etat. Haïti est plus que jamais sous tutelle. Comme si les grandes puissances ne souhaitaient pas que le peuple prenne son destin en main.

 


Pourtant, Haïti a droit au remboursement de sa dette financière, écologique, sociale, par l’Occident et notamment par la France, l’Espagne et les Etats-Unis, directement responsables de la réduction de cette île à un tas de cendres. S’ils voulaient vraiment s’acquitter de leur dette, ces trois pays devraient créer un fonds de réparation de plusieurs milliards d’euros, destinés à reconstruire Haïti et à provisionner le remboursement de cette dette à l’égard du peuple Haïtien. L’urgence, c’est vrai, est à la solidarité internationale immédiate et tous les efforts sont les bienvenus.



Mais la reconstruction commence maintenant. Soit elle se fera sur des bases d’équité et d’égalité, soit elle se fera dans la pitié, comme le dit Jean Metellus, romancier et poète haïtien. « Depuis toujours, écrit-il, le monde regarde Haïti comme un immigré dont on ne veut pas ». Il a raison. Aujourd’hui, nous nous apitoyons sur Haïti, mais dans un mois, dans un an qu’en sera-t-il ? Demain nous la zapperons une fois de plus. En attendant la prochaine famine ou le prochain coup d’Etat.

 


Noël Mamère, le 18 janvier 2010

 


1. Des sans-papiers à l’Assemblée ! Je suis heureux d’avoir pu organiser une conférence de presse qui fera date, en collaboration avec les 11 organisations associatives et syndicales et les délégués des 6 000 grévistes qui occupent leurs entreprises depuis trois mois pour obtenir leur régularisation. L’Assemblée nationale, qui ne cesse de prendre des mesures vexatoires, xénophobes et discriminantes envers les immigrés et les sans-papiers, s’est retrouvée prise la main dans le sac pour avoir employé des dizaines d’étrangers en situation irrégulière, dans le cadre de ses travaux de rénovation. Quatre sans-papiers ayant leur badge d’accès à l’Assemblée ont pu témoigner des conditions de travail et d’embauche par des sous-traitants dépendant du donneur d’ordre. Des députés de toute la gauche les soutenaient ainsi que deux députés de l’UMP. Au delà des débats nauséabonds sur l’identité nationale, cet exemple est à méditer. L’hypocrisie sans nom qui constitue le fond de commerce d’une partie de la classe politique française vient d’être mise à mal là où elle prétend donner des leçons à la France entière.

 


2. Lancement réussi de la campagne d’Europe Ecologie. Un meeting de 2 000 personnes a lancé samedi à Montreuil, le premier étage de la fusée « EE » cuvée 2010. Nos listes sont créditées de 17 % en Ile de France, de 15% sur le plan national. Qui aurait dit, il y a deux ans, que nous pourrions envisager un tel score ? La convergence des crises accelère décidément la recomposition. Ce n’est pas le casting qui paie, mais le projet. L’écologie a le vent en poupe car les recettes du libéralisme et de la gauche productiviste apparaissent obsolètes pour la majorité des citoyens.

 


3. La mort de Daniel Bensaïd, décédé le 12 janvier 2010, est une perte non seulement pour le NPA, son organisation, mais aussi pour tous ceux qui pensent l’émancipation. Ce militant internationaliste, intègre et généreux, a été de tous les combats du mouvement ouvrier et du mouvement écologiste. De Malville au Larzac, d’AZF à Toulouse, dont il était originaire, comme dans les luttes contre les délocalisations ou pour le service public. Daniel Bensaïd, philosophe-militant, avait compris l’importance de la convergence entre l’écologie et le socialisme, qu’il avait caractérisé par la notion d’ « écosocialisme ». Pour lui, comme pour nous, ce qui éclairait l’avenir c’était la liaison entre l’ anti-productivisme et la sortie du capitalisme. L’écologie est condamnée à l’échec si elle refuse le lien entre le paradigme écologique et la question sociale. Il avait également saisi que la prise en compte du temps long de l’écologie oblige à repenser la temporalité des conditions de la lutte politique. Nous avions des divergences, mais elles sont à relativiser par rapport à la perte que représente sa disparition pour toutes celles et tous ceux qui ne se résignent pas à l’ordre dominant.

Tag(s) : #actualités internationales
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