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La commission Affaires économiques et monétaires du Parlement européen a reçu lundi 28/09 Jean-Claude Trichet, président de la Banque Centrale Européenne (BCE), pendant deux heures. La règle: 1 minute 30 pour poser sa question. Et 3 minutes 30 par réponse pour le président de la BCE.

Je tire trois enseignements de cette réunion de travail.

 

 

D’une part, Jean-Claude Trichet apparaît bien démuni sur des problèmes principaux auxquels est confrontée la BCE. Dès 2007, pour sauver les banques privées, la BCE s’est portée garante à leur place sur des titres très risqués. Le montant des risques portés par la BCE dépasse les 700 milliards d’euros, soit bien plus que les fonds propres de la Banque centrale. Comment sortir de cette situation? A cette question, posée par un collègue vert, le président a répondu «votre question est totalement pertinente». Sans apporter le moindre début de réponse.

 

 

 

D’autre part, se joue en ce moment une guerre en coulisse entre les États et la Banque centrale pour le contrôle de la nouvelle autorité de supervision macroprudentielle (autrement dit l’autorité qui aura la responsabilité de dire si le système financier dans son ensemble prend trop de risque) créée par la directive que la Commission européenne a publiée le 23 septembre dernier. L’objectif est de répondre à un problème auquel est confronté la BCE, à savoir que son mandat de stabilité des prix destiné à assurer un cadre macroéconomique pérenne pour les entreprises et les investisseurs est totalement vidé de son sens si le système financier dérégulé génère une incertitude radicale pour les entreprises.

 


Or, la BCE n’a aujourd’hui aucun pouvoir sur le système financier lui-même. Jean Claude Trichet explique à juste titre que c’est pour tenter de limiter les bulles d’actifs (comme l’immobilier ou les titres financiers) que la Banque centrale a conservé une politique de taux d’intérêt relativement élevée par rapport à son homologue américain notamment. Mais force est de constater que la politique de la BCE a échoué et que la bulle d’actifs s’est quand même constituée jusqu’à exploser. Son type d’intervention (le taux d’intérêt) n’est donc pas adapté ou pas suffisant. Ce sera donc le rôle de l’autorité de supervision que de suivre l’évolution des risques, des bulles spéculatives et de tirer la sonnette d’alarme. Toute la question est de savoir qui va contrôler cette autorité, les États ou la Banque centrale.


 

La proposition actuelle de la Commission est un compromis byzantin entre les intérêts des banques centrales (qui ne veulent pas céder ce nouveau pouvoir aux États) et ceux des États (qui sont les payeurs en dernier ressort et ne veulent pas laisser à la BCE le pouvoir monétaire  et le pouvoir de supervision). Jean-Claude Trichet est donc en campagne devant le Parlement, qui se prononcera sur ce texte en 2010.

 

 

 

Enfin, et c’est le troisième enseignement, une écoute attentive de ses propos peut laisser penser que le président de la BCE n’est pas hostile à une régulation plus stricte de la finance. A la question «êtes vous favorable à une taxe Tobin?», il répond «je suis contre une taxe version Tobin». Une phrase qui (soyons un peu optimiste !!) peut sous entendre qu’il n’est pas contre une taxe sur l’ensemble des transactions financières (et pas seulement sur le marché des changes comme le proposait initialement Tobin). Par ailleurs Jean Claude Trichet a martelé qu’aucun segment de la finance ne devait rester en dehors de la régulation. Une phrase qui sonne comme un soutien à la directive de régulation des fonds spéculatifs actuellement en cours de discussion au Parlement et au Conseil et que les lobbies de la City veulent voir amoindrie.


 

Pascal CANFIN, député européen EUROPE ECOLOGIE


 

http://ecologie.blogs.liberation.fr/

Tag(s) : #Economie
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